lundi 2 février 2015

Apprendre à vivre avec ce que l'on ne veut pas vivre...

Durant les six derniers mois, je suis allée à plus de rendez-vous médicaux que j''ai plaisir à m'en rappeler.

Dernier RDV avec François, psy spécialisé de la clinique de douleur, j'ai ainsi utilisé toutes les ressources médicales allouées par la clinique de la douleur au CHUL.

Six mois plus tard, j'ai une bonne compréhension et gestion de la douleur. Je chemine maintenant sur "l'apprendre à vivre avec".

En six séances avec François, ce que j'aurai le plus apprécié aura été de pouvoir parler de la douleur intelligemment. De pouvoir approfondir intellectuellement cette situation de merde que je vis au quotidien. Vivre avec un visage constamment coupé en deux. Avec ce côté douloureux aux multiples symptômes et névralgies diverses...

Chaque fois que je suis sortie de son bureau du CHUL, je me suis sentie grandie par les réflexions partagées. Il me peine de le quitter. J'ose croire que lui aussi a un petit serrement de cœur. En cette dernière séance, il se lâche plus. Ça a d'l'air que je le fais rire. Ce qui m'amuse aussi et allège le tout.

Parler de sujets lourds avec un peu d'humour aide à la cause. Il me dit: 

- J'ai été heureux de faire votre connaissance. Je vous le redis, vous êtes sur la bonne voie. Si vous étiez dans le champ, je n'hésiterai pas à vous le dire mais ce n'est pas le cas. Vous avez une bonne base de réflexions et vous cheminez dans la bonne direction. C'est pour cela que j'ai confiance...

Bref, je ne suis pas folle et je suis bonne élève. Ce qui ne rend en rien le tout plus facile. Mais bon... merci quand même! See ya in the next life!

La douleur chronique, un principe contre intuitif à nos valeurs occidentales?

En cette dernière séance, j'ai voulu creuser le fameux principe "d'apprendre à vivre avec". Un principe qui est intimement lié à l'acceptation de sa condition. Selon François, moins on juge négativement la douleur que l'on ressent, mieux on la supporte. La clé de la raison est dans la gestion de ces émotions qu'elle engendre.

Je retiens à quel point apprendre à vivre avec un visage dont un coté est en douleur continue est contre-intuitif à mes racines occidentales. Sachant que nos sociétés occidentales associent le bien-être avec l'absence de souffrance, il nous est plus difficile de capter la vie dans la douleur. D'accepter la vie dans la douleur. D'accepter la douleur dans la vie?

En Occident, il ne nous est absolument pas naturel d'accepter de vivre avec la douleur. Ce qui est moins le cas dans les cultures orientales parait-il. Je lui répond:

- Mais c'est de la bullshit sachant qu'il est impossible de vivre une vie entière sans souffrance aucune! On est si cons? 

Il sourit. De ces petits sourires qui me manqueront avant de poursuivre son explication sur combien apprendre à vivre avec la douleur constante n'est pas naturel à nos sociétés modernes et combien cela peut nous rendre la tâche plus complexe. Bon point François! J'aurais bien pris une autre demi douzaine de séances pour mieux faire...

Apprendre à vivre avec un mal physique qui mine le moral...

En ce cheminement particulier je réalise à quel point il faut se puiser en ses ressources intérieures pour ne pas s'effondrer et ne plus se relever. Car les ressources extérieures sont quasi inexistantes. Enfin sans la morphine, ce serait encore une autre galère!

"Apprendre à vivre avec" est la seule solution viable à mes yeux, pas évidente du tout, un cheminement intense où il n'y a personne pour m'inspirer. Ce que je déplore. C'est d'ailleurs ce que j'ai expliqué en cette dernière séance...

Le corps médical nous dit qu'il faut "apprendre à vivre avec" mais n'a aucun exemple à présenter ou services à donner en cette direction. Je rêve de connaitre l'histoire d'une personne en douleur constante qui a appris à vivre avec et en témoigne. Je rêve de pouvoir me dire: "Si lui ou elle est capable, alors moi aussi!"

En théorie, le corps médical nous dit: "Apprends à vivre avec". En pratique, on trouve bien peu d'exemples de ceux qui le font. C'est comme si ces gens là n'existaient pas (ou ils se cachent?). Et Dieu sait que je cherche ceux qui auraient réussi! Est-ce du domaine de l'impossible?

Selon lui, c'est en effet très difficile mais pas impossible. Enfin ceux qui y arrivent ne font pas légion! Et c'est pour cela que j'aurais bien pris six autres séances car il me semble que l'on a plus effleuré cet arbre des possibles qu'on ne l'a exploré. Mais les ressources médicales ne sont pas là et il faut faire avec les quotas!

Alors comme je n'ai pas gros pouvoir sur la souffrance physique que je vis au quotidien, je vais continuer de travailler à maîtriser au mieux ses effets sur mon mental. Puisque c'est le seul contrôle qui me reste, je n'ai pas encore dit mon dernier mot!

 Sachant que je dois "apprendre à vivre avec" si je veux, de nouveau, me sentir exister à part entière. Avec ou malgré la douleur. Qu'importe. Tant que j'arrive à me sentir vivre...

1 commentaire:

  1. Merci !! Je suis dans le même cas que vous. J'ai beaucoup de mal à en parler mais je vous lis ça me fait du bien.

    RépondreSupprimer