mercredi 11 mars 2015

Cette chanson était pour moi...


Hier, sur la route qui me mène vers ma kiné en ville. J'essaie de ne pas me concentrer sur le triangle de douleur qui me dévore la moitié du visage. Ce triangle qui s'élance des gencives pour transpercer l'oreille, m'écarteler l’œil (qui en devient myope) et me déchirer la joue en rejoignant la bouche.

En cette douleur que j'assume, la route défile sous mes roues. Le paysage morne accompagne mes pensées lugubres. Je sens la peur les obnubiler. La peur des résultats du prochain IRM. La peur du futur. Comment, avec de telles sensations, si intenses, ne pas percevoir mon visage se décomposer sous ma peau?

S’enchaînent en cascades tous ces scénarios cauchemardesques que peuvent former ces douleurs qui me labourent le visage, en continu, depuis quatre ans. Nerf facial foutu. Dégénérescence osseuse de la machoire, cancer de la glande parotide? Que me réserve le futur?

Oublier que cela fait tellement de fois, depuis quatre ans, que je fais cet aller/retour en ville pour me faire remettre le visage en place. Tellement de fois que je n'ose plus les compter sans m'écrouler de l'intérieur.

Tout ça pour donner à mon nerf facial endommagé une chance d'aller mieux. Une chance de se régénérer. Tout ça pour me donner une chance d'exister en cette nouvelle réalité, façonnée par ce nerf facial endommagé.

Alors que je lute contre ces multiples émotions qui m'agressent la cervelle en plus de ces sensations douloureuses que m'offre mon visage, passe à la radio cette chanson là...

Et à ce moment là, je me dis que je ne dois pas lâcher. Que je dois m'adapter. Que je dois continuer d'avancer. Que je dois garder espoir en me nourrissant de toutes ces choses qui font que la vie mérite d'être vécue. Que je dois me reconstruire de l'intérieur avec cette douleur. Que je dois tenir la route.

Quoiqu'il arrive d'ici là, je dirais toujours non au malheur qui me fait peur. Mentalement, serrer les poings. Est-ce que cette chanson est pour moi? Peut-être bien. En cet instant précis, elle est à moi. D'un coup la route me semble plus douce. Il n'y a rien comme la musique pour adoucir les maux, n'est-ce pas?

Ce qui est certain c'est qu'elle me soulève les idées sombres.  Elle allège, en son refrain, ce poids invisible qui pèse sur mes épaules. Mine de rien, en quelques mélodies joyeuses, elle m'aide à reprendre le contrôle de mes pensées. À les maîtriser.

J'arrive à destination l'humeur plus légère. Merci Ici Musique! Merci Sébastien Lacombe que je découvre en cette chanson!


Les manipulations faciales qui décompressent mon nerf blessé sont une douce torture à laquelle je m'adonne une à deux fois par semaine. Je ne sais pas toujours si c'est pour le mieux mais je sais que c'est pour le pire lorsque j'essaie de faire sans.

Alors j'accepte la douleur du traitement pour la bonne cause. Parce-qu'il faut bien avancer dans la vie... et sourire... et fredonner... et danser... envers et contre tout...

Le lendemain, je fais écouter cette chanson à mon homme. Comme tous les matins où l'on se réveille à l'aube pour que j'avale ces médicaments qui font le pansement de ma plaie invisible. Il m'accompagne et me soutient.

Comme tous ces matins où je me réveille avec une moitié de visage en guerre. Comme tous ces matins où je refoule ces larmes qui ne demandent qu'à s'écouler. Ces larmes qui coulent doucement en écoutant cette chanson trop tôt de bon matin.

Il me prend dans ses bras. Partage l'émotion crue. M'enrobe de son amour. Et me chuchote: "J'aurais aimé t'écrire cette chanson là."

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